Déloyauté de la preuve et droit à l’assistance d’un avocat
« -Allez on y va, zou. Pour l’avocat je vous ai demandé tout à l’heure.
-Euh
-on continue sans avocat. Votre femme a appelé mais on arrive en fin de garde à vue.
-Euh »
Retranscription de l’enregistrement dans le procès verbal :
« -Consentez-vous a être entendu sans avocat ?
-Oui »,
ce qui n’était pas vraiment la même chose.
Inutile de souligner que dans ce dossier porté par le cabinet devant la Cour de cassation, de telles déclarations ne semblaient pas constituer une renonciation « consciente et éclairée » à l’assistance d’un avocat, telle que l’exige la Cour de Strasbourg.
Au cours de cette audition, le gardé à vue a fait des déclarations incriminantes sans avoir pu bénéficier de l’assistance d’un avocat.
La Chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé la décision de la chambre de l’instruction pour avoir rejeté la requête en nullité sans avoir recherché :
1. Les conditions dans lesquelles l’enquêteur avait mis la personne en mesure d’exercer son droit à l’assistance d’un avocat;
2. Si l’administration de la preuve n’avait pas été déloyale de ce fait.
Il était soutenu, dans la requête en nullité, qu’elle avait été déloyale du fait de la retranscription infidèle de l’audition dans le procès verbal et du fait qu’il avait été trompé sur son droit de bénéficier d’un avocat à ce stade.
Cette cassation vise donc à préserver le droit à l’assistance effective d’un avocat lors des auditions en garde à vue, ce dont on ne peut que se féliciter.
D’autant plus, dans le contexte d’un texte à la rigidité confinant à l’absurde (63-3-1 cpp), interprété littéralement par la Chambre criminelle, suivant lequel si on a prévenu une certaine personne pour désigner un avocat, aucun autre proche ne peut en désigner un (Crim, 19 octobre 2021, 2181569, publié au bulletin), même si comme en l’espèce un simple message avait été laissé sur le répondeur du frère du gardé à vue et que son épouse, qui n’était pas une « personne prévenue » au sens du texte, avait pris attache avec un avocat.
Un droit effectif mais pas toujours, donc.